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Instruments de musique

La musique profane médiévale est une musique fonctionnelle qui se transmet essentiellement par oralité. On a depuis peu d'années revu ce type de transmission pour les troubadours qui sûrement prenaient des notes qui malheureusement on quasiment été perdues.

 

La musique accompagne et rythme la vie de toutes les couches sociales : l’aristocratie, le clergé et le peuple. La séparation entre profane et sacré est inexistante puisque l’origine du monde est divine. La musique permet de retrouver et d’exprimer sur terre

l’harmonie universelle.

 

Les musiciens du Moyen Age distinguent les "hauts" et les "bas" instruments, non pour leur registre mais pour l'intensité sonore et leur utilisation qui en est généralement faite. Ainsi les "hauts"  instruments, ceux qui sonnent haut et fort : chalémie, cornemuse, chifonie, trompette, tambour et cymbales, servent pour la guerre, la chasse et la danse de plein air. La chanson et le récit, à l'intérieur des murs, sont accompagnés d'instruments aux sons bas et doux : gigue, flûtes, psaltérion, harpe, guitare, citole, cièle et luth.

 

(Source - Claude Riot / Chansons et instruments)

 

Présentation des instruments de musique au Centre de découverte du Moyen Age à Egletons

Il reste peu de traces de la musique pratiquée avant le Xe siècle car elle n’est pas écrite, de plus les instruments ne sont pas parvenus jusqu’à nous. L’iconographie présente sous forme de sculptures dans les églises, les vitraux , les enluminures est donc la source de renseignements unique avec la transmission de ces instruments dans la musique populaire. Deux catégories sont mentionnées : les «hauts instruments » à la sonorité forte et les « bas instruments » à la sonorité plus intime et feutrée.

 

Depuis l’Antiquité, on distingue trois grandes familles d’instruments de musique : cordes, vents et percussions (instruments pourvus d’une membrane et instruments résonnant par eux-mêmes). Les théoriciens du Moyen Âge déconsidèrent l’emploi des instruments dans la pratique musicale, plaçant la musique instrumentale à un rang inférieur à la musique vocale, elle-même inférieure à la musique céleste.

Toutefois, le double héritage de la culture antique et de la Bible, au sein de laquelle figurent d’éminents musiciens, à l’image du roi David, infléchit cette posture, au profit des instruments à cordes. Déjà, la mythologie s’était emparée du thème de la hiérarchie des instruments au travers, par exemple, du combat qui opposa Apollon à Marsyas. Dès lors, les cordes devinrent symboliques de l’harmonie, de l’élévation de l’esprit, de l’intelligence, de la mesure, tandis que les vents symbolisèrent la dimension physique de l’homme, sa sexualité, ses pulsions.

La fonction rythmique des percussions, les place également à un rang inférieur. Quelques exceptions dérogent à ce classement, à l’instar des trompes, de l’orgue et des cloches, dès lors que l’Eglise en a recours pour la liturgie, comme outil théorique ou lorsque l’un de ces instruments incarne l’intervention divine, la parole de Dieu.

 

Seuls les instruments à vent et les cordes sont représentés dans notre catalogue et l’iconographie du roi psalmiste David y tient une place importante. La harpe lui est fortement associée. L’iconographie privilégie la harpe à colonne, variante de la harpe traditionnelle irlandaise, attestée dès le VIIIe siècle. Ses cordes étaient métalliques, tandis que la tradition méditerranéenne employait des cordes en boyau.

 

La harpe est à rapprocher du psaltérion. Cet instrument de la famille des cithares produit des sons tenus qui le rendent approprié pour l’accompagnement de la lecture des psaumes. En ce sens, au Moyen Âge, il est très fortement attaché au psautier. Dans l’iconographie, on l’associe ainsi souvent avec David. De forme triangulaire, rectangulaire ou trapézoïdale, il aboutit à de nombreux dérivés dont une harpe-psaltérion ou harpe hybride.

 

(Source - Manuscrits DRAC BNSA Aquitaine.fr)

 

 

 

Noter la musique instrumentale

 

Au Moyen Âge, la notation de la musique instrumentale reprend la forme dévolue au chant. Dans un concert instrumental, les instruments jouent presque toujours une fidèle transcription de la musique vocale. C’est seulement à partir du XVe siècle que l’instrument s’émancipe du seul rôle d’accompagnement pour s’emparer de celui de soliste. Dès lors, naît et se développe la tablature, notation propre à toutes sortes d’instruments pouvant faire entendre simultanément plusieurs sons : luth, guitare, cistre, orgue, clavecin…

Il s’agit d’une notation « directe » qui indique au musicien où placer ses doigts sur le manche de l’instrument. Elle comprend cinq ou six lignes représentant chacune une corde de l’instrument ; la ligne inférieure correspond à la corde la plus grave. Sur ces systèmes de lignes, des figures, des lettres et des chiffres donnent des indications précises sur l’emplacement où doit être posé chaque doigt sur chaque corde.

 

(Source - Manuscrits DRAC BNSA Aquitaine.fr)

La vièle à archet 

 

La vièle à archet est l’ instrument privilégié des jongleurs et ménestrels; elle est utilisée pour la danse et pour la chanson.

Le rebec ou gigue : Instrument de facture simple, réalisé par le savetier du village, il servait à faire danser , d’où son nom de gigue. Il se distingue du rebab par sa table d’harmonie qui est en bois, alors qu’elle est en peau chez le second. Le rebab arabe, la lira crétoise et le kémanché turc évoquent cet instrument.

 

Le désir d'égaler la voix humaine a présidé au développement de la vièle à archet, instrument privilégié des jongleurs et menestrels, dont la pratique leur était quasi obligatoire et suscitait de véritables écoles d'interprétation. Fort prisée das auditeurs, elle pouvait aussi bien être utilisée pour la danse que pour la chanson, grâce à ses possibilités mélodiques et à sa grande souplesse de phrasé. Cette célébrité lui vaut de figurer en large place dans l'iconographie. Petite et ovale, en forme de huit, ou grand rectangle arrondi, la caisse était construite par assemblage avec un manche rapporté. L'instrumentiste pouvait en jouer "à bras" en la tenant contre son épaule, ou "à gambe" posée sur le genou, en se servant d'un archet courbe de petite taille pour la danse, de plus grande pour la mélodie.

 

 

Daneuse medievale
roi david.png

Le cor et le cornet

 

L'olifant de Roland sonnait-il si fort que Charlemagne ait pu l'entendre par-delà  les montagnes ? Creusé dans une défence d'éléphant d'où son nom, ce devait être un instrument rare, cher et impressionnant.

 

Taillé dans d'autres cornes ou fait de métal, il devenait accessible au simple soldat et servait surtout à la guerre et à la chasse.

 

Taillé dans une grande corne, percé de plusieurs trous, le cornet à bouquin (de bocchino : petite bouche, embouchure) pouvait jouer quelques notes. Plus l'instrument était long et plus ses possibilités mélodiques étaient grandes. Les longues cornes étaient plus rares que les petites, on inventa, vers la fin du Moyen Age, le cornet en bois, fait de deux parties courbes, creusées dans le sens de sa longueur, puis collées et recouvertes de cuir. Sous cette forme, le cornet devint un instrument fort prisé à la Renaissance.

 

(Source - Chants et instruments / Claude Riot)

 

Tropaire-prosier de l'abbaye de Saint-Martial de Limoges

Le psaltérion et le tympanon

 

 

La cithare antique a donné naissance à toutes sortes d'instruments où les cordes sont tendues sur une caisse de résonnance. La psaltérion et le tympanon appartiennent à cette famille et peuvent être présentés ensemble car seul diffère le mode de production du son. En effet la forme des deux instruments est identique mais les cordes du premier sont pincées à l'aide de doigts ou de tiges de plumes d'oiseau appelées "plectres", celles du second sont frappées avec des baguettes. Il est cependant bien difficile de reconnaître un élément aussi précis sur les images et d'attribuer avec certitude une identité à l'instrument observé.

 

(Source - Chants et instruments / Claude Riot)

 

Instruments

Exposition sur la musique médiévale - Abbaye Saint-Savin sur Gartempe 2014

Plaque émaillée de l'Oeuvre de Limoges du XIIIème siècle

La cornemuse

 

Jouer d'un instrument en soliste pour la danse nécessite la production d'un son ininterrompu. La réserve d'air contenu dans le sac de la cornemuse apporte une réponse efficace à cette demande et exempte le musicien du difficile apprentissage du souffle continu des joueurs de chalumeau.

 

Il ne faut sans doute pas chercher plus loin l'extraordinaire succès de cet instrument universel ? Son origine est mal connue mais il est vraisemblable que les bergers joueurs de chalumeau eurent l'idée d'associer leur instrument et les animaux qu'ils gardaient. La poche de la cornemuse est en effet faite d'une peau de mouton ou de chèvre d'où le nom de cabrette donné à certaines variétés.

Chapiteau du palais de l'évêque Gelmirez à Compostelle.

Chapiteau du musicien à la cornemuse

Eglise du XIIème siècle d'Oradour-sur-Glane

L'instrument médiéval est relativement simple et ne comporte pas toujours de pipeau bourdon. Quand celui-ci existe, il peut être assemblé au chalumeau ou au contraire porté su r l'épaule. L'anche est simple, et l'articulation de deux tuyaux cylindriques emboîtés permet l'accord avec la tonalité du chalumeau. Une des difficultés du jeu de la cornemuse réside dans l'impossibilité d'agir sur le rythme ou le phrasé au moyen du souffle ou de la langue. L'instrumentiste doit donc compenser ce manque par une agilité des doigts sur le chalumeau.

 

(Source - Chants et instruments / Claude Riot)

Peinture du XIIème siècle -Eglise de Boussac Bourg

Représentation d'un joueur de cornemuse

David et ses musiciens - Psaumes de l'abbaye de Saint-Martial de Limoges

La harpe

 

Des quatre instruments antiques, la harpe est celui qui varie le moins au cours des siècles dans sa forme et dans sa conception. A l'époque des troubadours, deux types de harpes cohabitent qui se différencient par leur taille et le nombre de cordes.

 

La petite harpe, à sept cordes, héritée de celle que les bardes portaient suspendue "au col", sert aux jongleurs pour accompagner les chansons et les récits. On en joue debout, et sa petite taille et sa légèreté permettent de la transporter aisément.

 

L'autre, plus grande, se joue en position assise et comprend de 17 à 25 cordes. La caisse de résonnance, plus importante, donne à l'instrument un volume sonore plus conséquent et l'aspect de celui que nous appelons aujourd'hui, la harpe celtique.

 

Reconstituer aujourd'hui une harpe médiévale implique de décider d'un choix entre les deux types d'instruments. L'option doit tenir compte de l'uitilisation précue par l'instrumentiste.

 

(Source - Chants et instruments / Claude Riot)

Graduel de Fontevraud conservé à la bibliotèque de Limoges

Les cymbales et les autres ...

Cymbales, crotales, sistres, grelots, claquettes, castagnettes, claves, crécelle, triangle, guimbarde ... L'instrumentation médiéval comporte nombre de ces percussions dont la petite taille limite la représentation iconographique. Les cymbales sont les plus largement représentées. Utilisées par paire, elles ont toutes les tailles jusqu'aux plus petites, que l'on fixe sur le pouce et le majeur de chaque main. Reliées par une lanière, elles prennent le nom de crotales. Assemblées sur un support en bois, elles forment le sistre que l'on tient d'une main et que l'on frappe de l'autre.

 

 

 

Le luth

 

Instrument vieux de plus de trois mille an , très en vogue à l’époque médiévale à tel point que tout instrument à cordes a été nommé luth. On peut distinguer le luth à manche court - qui conserve son nom d‘origine - du luth à manche long appelé guitare sarazine ou maurache

 

 

Les tambours et pipeau

 

Trois sortes de tambours accompagnent danse et chant :

Le tambour sur cadre à timbre, le tambour cylindrique à deux peaux, les naquaires (timbales). L'association de la flûte et du tambour, très répandue au Moyen Age, permettait au musicien de jouer seul en assurant à la fois la mélodie et le rythme. Cette technique très populaire est encore employée par les tambourinaires provençaux, mais a été ailleurs supplantée par l'usage séparé du fifre et du tambour militaires. Le pipeau médiéval est aussi appelé galoubet. Il comporte deux trous pour les doigts et un pour le pouce, et permet le jeu de deux octaves. Le tambour peut être accroché à la taille, porté en bandoulière ou suspendu au bras gauche.

 

La flûte

 

Comme depuis le Paléolitique, la flûte est l'instrument le plus simple et le plus répandu dans toutes les civilisations. Un filet d'air produit par le souffle du musicien vient se briser sur un biseau et fait vibrer la colonne d'air contenue dans le tuyau. La flûte médiévale, que l'on appelle généralement pipeau, a six trous pour les doigts et qucun pour le pouce. Le musicien obtient une seconde octave en augmentant la pression du souffle. La flûte droite dite "flûte douce" à cause de sa sonorité est la préférée de l'époque médiévale qui en multiplie les variété.

Tombeau en calcaire du XIIème siècle des vingt quatre vieilards de l'apocalysme

Collégiale de Saint-Junien

Le crwth

 

Dans un manuscrit dit Tropaire-prosier de l'abbaye de Saint-Martial du XIème siècle on retrouve cette illustration du roi David jouant du Crouth trithan.

 

C'est là le curieux nom, d'origine galloise ou irlandaise, d'un instrument qui n'est autre qu'une variante de la lyre, mais dont les cordes sont frottées à l'archet . Le nom gallois de l'instrument (crwth) vient du celtique primitif cruisigh, (musique), qui tire lui-même son origine du sanscrit krus' (crier, produire des sons puissants), dont la racine est kur (rendre un son).

 

Il y eut deux sortes de crouth, lesquelles appartiennent à des époques différentes. Le plus ancien de ces instruments est le crouth trithant représenté sur le manuscrit de Limoges, c'est-à-dire le crouth à trois cordes : il est vraisemblable que c'est celui-là dont parle Venance Fortunat. Peut-être même ce crouth primitif n'avait-il que deux cordes, comme en eurent encore longtemps après d'autres instruments . L'instrument se reconnaît à l'échancrure, par ou passe la main pour poser les doigts sur les cordes.

 

(Source  : Antoine STRADIVARI / Lutherie)

La chalémie

 

Prenez une tige de roseau, taillez-la près d'un noeud et percez quelques trous avec une pointe  rougie  au feu. Découpez enfin, près du noeud, une fine  lamelle en prenant soin de ne pas la détacher , ligaturez cette "anche" à sa base et ajoutez une corne évasée à l'extrémité ouverte du roseau. Vous avez réinventé le chalumeau, l'un des plus simples et des plus anciens  instruments que les bergers de l'Antiquité grecque appelaient aulos. Ce chalumeau primitif pouvait également être double, fait de deux roseaux assemblés, le second sans perce produisant un son continu. Pour rendre l'instrument plus puissant  une anche double remplaça la lamelle taillée dans le tube. La clarinette et le haubois de l'orchestre symphonique doivent tout à ces bergers antiques.

Exposition sur la musique au Moyen Age à l'abbaye de Saint Savin sur Gartempe

Le nom médiéval "chalémie" (hérité du latin calamus : roseau) désigne donc un instrument en bois à perce conique et pavillon évasé, percé de huit trous, dont l'anche n'est pas pincée. L'instumentiste appuise ses lèvres sur une "pirouette" de bois et gonfle les joues, l'anche sonne par pression comme une cornemuse. Les chalumeaux qui survivent , en très grand nombre, dans le monde entier : bombarde bretonne, zurla slave, piffaro italien, tarogate hongrois, sona chinoise, algaita du Niger ... dont les musiciens jouent souvent avec la technique du souffle continu, nous donnent un aperçu de la puissance de la chalémie médiévale, faite pour sonner en plein air et mener la danse.

L’ orgue

 

Après une longue éclipse, il nous revient d'Orient, et pour la première fois sous forme d'un présent de l'empereur byzantin au roi des Francs Pépin le Bref: il semble s'agir encore d'un hydraule. Seul son nom a changé : organum. C'est là un instrument d'exception. Il se présente sous deux formes : le portatif et le positif (image de gauche).

Il faut attendre le XII' siècle pour que l'orgue fasse son apparition dans l'église : d'abord modeste guide-chant portatif, il se joue d'une seule main, l'autre actionnant le soufflet. Ce portatif, devenu un peu plus volumineux, se pose sur une table. On peut alors le jouer avec les deux mains : mais il requiert la présence d'un souffleur. Cet orgue de table, encore transportable, va évoluer vers un instrument plus encombrant, plus lourd, fixé à demeure sur un socle ou dans un meuble : le positif.

Tropaire-prosier de l'abbaye de Saint-Martial de Limoges

Tropaire-prosier de l'abbaye de Saint-Martial de Limoges

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